L'arrêt n° 13615 déposé le 8 avril 2025 par la VI Section pénale de la Cour de Cassation marque un nouveau point d'ancrage en matière de faux dans les actes, abordant la question – loin d'être théorique – de la nature juridique des conventions stipulées par des sujets publics et des responsabilités pénales y afférentes. Le cas, qui voyait l'agent public F. D. V. inculpé, offre l'occasion de réfléchir à une frontière souvent débattue : quand un document peut-il être qualifié d'« acte public » au sens de l'art. 479 c.p. ?
La Cour d'Appel de L'Aquila avait condamné le fonctionnaire pour faux idéologique, estimant que la convention qu'il avait préparée, non conforme à la volonté de l'organe compétent, devait être assimilée à un acte public. La Cassation, accueillant le pourvoi, a en revanche annulé sans renvoi la décision de second degré, reconnaissant l'inexistence du délit.
N'intègre pas le délit de faux idéologique, prévu par l'art. 479 du code pénal, la conduite du fonctionnaire qui rédige délibérément le contenu d'une convention d'une manière divergente de la volonté de l'organe institutionnellement chargé d'en définir les contenus, étant donné que la convention n'a pas la nature d'acte public, c'est-à-dire de document destiné à attester ne serait-ce que les prémisses factuelles d'un acte, mais d'accord entre parties publiques, ou entre une partie publique et une partie privée, pour la réglementation d'aspects d'intérêt commun.
Commentaire : la Cour rappelle la fonction typique de l'acte public – attester des faits et des déclarations avec une foi privilégiée – la distinguant de l'accord contractuel, tel qu'est la convention. Il en découle qu'en l'absence de cette fonction certificative, la protection pénale prévue par l'art. 479 c.p. ne peut s'appliquer. Le principe s'aligne sur des précédents de 1992 et sur des arrêts plus récents (Cass. 17089/2022 ; 37880/2021), renforçant un courant désormais consolidé.
La décision se fonde sur la combinaison des articles 476-479 c.p. et de l'art. 2699 du code civil qui définit l'acte public. La convention, bien que rédigée par un fonctionnaire, reste un contrat administratif ou mixte : elle manque de la finalité de documenter la vérité judiciaire, se limitant à réguler des intérêts entre les parties. La transcription erronée de la volonté contractuelle pourra, le cas échéant, être pertinente sur le plan civil (nullité, responsabilité précontractuelle ou dommages-intérêts) ou administratif (responsabilité disciplinaire ou financière), mais sort de la sphère pénale du faux.
Le verdict offre des indications opérationnelles à ceux qui rédigent ou supervisent des conventions :
La Cassation réaffirme que la zone d'application du faux idéologique doit être délimitée avec rigueur, conformément au principe de légalité et d'interprétation stricte de la norme pénale. Lorsqu'il s'agit d'un document qui, bien que rédigé par un fonctionnaire, remplit des fonctions essentiellement contractuelles, la protection pénale du faux ne peut être invoquée. Pour les administrations, les professionnels et les citoyens, l'arrêt offre un précieux vademecum : avant d'invoquer le Code pénal, il est nécessaire d'établir la nature réelle de l'acte. Ce n'est qu'ainsi que l'on évitera des incriminations non fondées et que l'on orientera les éventuelles demandes de réparation vers les voies juridiques appropriées.